Matière, énergie et environnement : les limites de la planète

Matière énergie et environnement

Matière, énergie et environnement : les limites de la planète

Le Collectif Passerelle a pour objectif  de mieux comprendre et de faire connaître  les liens entre recherche scientifique, impératifs écologiques, conséquences des choix technologiques, et action politique.

 

Trois dimensions interconnectées

Une erreur aussi banale que dangereuse en matière d’étude du dérèglement climatique consiste à ne penser qu’en termes de baisse d’émission de CO2. Plus exactement, à ne pas voir que le problème ne porte jamais sur une seule direction. Il porte en réalité sur trois dimensions interconnectées et indissociables : matière, énergie et environnement. Par exemple, transformer des matières en utilisant de l’énergie modifie toujours l’environnement. Directement, parce qu’il faut extraire ces matières et les transformer. Indirectement, parce que ces opérations produisent des déchets. Hélas, n’agir que sur une seule des crises qui frappent ce triptyque aboutit souvent à aggraver les deux autres.

Les fausses bonnes idées qui font l’impasse sur l’un ou l’autre des piliers de ce triptyque sont malheureusement légion. Citons en vrac la voiture électrique, les biocarburants, la recherche de métaux rares dans les astéroïdes, le sauvetage d’animaux en hélicoptère. Moins évident mais non moins vrai, le recyclage des matériaux (verre, plastique, carton). Certes, c’est une façon d’économiser de la matière. Mais le recyclage exige un apport important d’énergie et rejette malgré tout des déchets dans l’environnement. Plus évident, et tout aussi vrai, utiliser le nucléaire permet bien sûr de produire de l’énergie avec moins de rejet de CO2. Mais en puisant dans les ressources de la planète et en dégradant l’environnement pour des centaines, voire des milliers d’années. De même, utiliser des bateaux pour nettoyer des océans améliore l’environnement océanique, mais nécessite des matières premières pour leur construction et de l’énergie pour leur fonctionnement. Sans parler de l’absurdité d’une civilisation qui prend l’océan pour une poubelle.

 

Renoncer aux solutions miracles

Pour lutter contre le dérèglement climatique, il faut donc réduire notre impact sur ces trois aspects en même temps. Même si c’est émotionnellement difficile à accepter, cela implique de renoncer aux solutions miracles, et à beaucoup de « confort moderne » dans notre quotidien. C’est une habitude, mentale, comportementale et politique à prendre. Elle concerne nos décisions et nos actions, individuelles, collectives, économiques, technologiques, politiques. Toutes doivent être évaluées à la lumière non pas d’un seul critère, mais des trois : matière, énergie et environnement.

Cette analyse nous conduit inexorablement à la sobriété. Individuellement, en rétablissant le lien entre nos actions et la perception de leurs conséquences. Collectivement, en répartissant les contraintes et en activant des mécanismes de régulation et de limitation. Et ce de façon radicale, urgente et équitable ; car ces trois critères sont d’une égale importance. Cette analyse nous conduit encore plus inexorablement à abandonner les expressions « croissance verte » ou « développement durable ». Ces dernières sont des contradictions dans les termes. Il est en effet impossible de maintenir les croissances démographique et économique en consommant moins d’énergie, moins de matière et sans dégrader l’environnement dans un même mouvement. Les limites physiques de la planète sont indépassables.

 

Penser le problème autrement

À quoi nous contraint la conscience du triptyque matière-énergie-environnement comme unique source de l’existence du vivant ? À prendre constamment en considération la décroissance démographique et économique et le changement de structure qu’elle entraîne. Pour le dire simplement, l’idée n’est plus de trouver un nouveau carburant, un moteur plus économique ou de meilleurs pneus pour les voitures, mais bien de les remplacer par des vélos, ce qui est beaucoup plus sobre énergétiquement. Et pas plus triste pour autant !

Ces changements signifient faire des choix, puis consentir des efforts massifs. Et immédiats, sinon ces efforts inévitables seront encore plus difficiles à l’avenir, en particulier pour les personnes les plus vulnérables. Les discuter et les organiser collectivement permettra que ces efforts soient plus justes et plus efficaces, que chacun·e les accepte plus facilement et garde un contrôle sur son avenir plutôt que de le subir. Le productivisme et la civilisation industrielle reposent sur une croissance constante, dont le prix obligatoire est un raz-de-marée de désastres environnementaux et sociaux. Voilà pourquoi nous devons démanteler au plus vite ce système mortifère.

 

Collectif Passerelle

 

1 Comment
  • Lucho
    Posted at 15:28h, 23 octobre Répondre

    Bonjour,

    Merci pour cet article qui semble beaucoup faire écho à The Limits to Growth en apportant un regard critique sur les solutions miracles et la technologie (un point faible du Club de Rome justement).

    En revanche, je suis plus perplexe sur deux points :
    – La considération très rapide, comme en passant de la « décroissance démographique ». Pouvez vous développer (je préfère vous demander que de vous prêter des propos que j’aurais juste mal interprété)
    – J’ai abandonné ma voiture pour un vélo dès que j’ai pu, et je suis un grand amateur de la petite reine. En revanche, bien que moins polluant, le vélo nécessite toujours l’entretient de route (dans une moindre mesure, certes). L’empreinte carbone d’un vélo est négligeable comparé à une voiture, mais ses matières premières et l’énergie nécessaire à sa fabrication (+transport) ne sont peut être pas si anodine. En témoignent les cimetières des vélo en Chine suite à leur retrait de la circulation par les entreprises de location du pays.

    Donc passer de la voiture au vélo va dans le bon sens en terme de sobriété, mais ne doit pas constituer également une « solution miracle », comme vous le dites si bien.

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